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Wednesday, July 27, 2022

Dominique Ducharme regrette que le nouvel état-major du Canadien l’ait laissé dans le noir - The Athletic

Lorsqu’on repense aux mois de misère qui ont mené au congédiement de Dominique Ducharme, on repense à certaines décisions dont on peine à comprendre le sens encore aujourd’hui. Le fait qu’il se soit accroché aussi longtemps à Cédric Paquette, par exemple, ou qu’il ait un jour décidé qu’il valait mieux placer Jake Evans sur l’aile droite du premier trio afin de réinsérer Jonathan Drouin au centre pour la première fois depuis des années.

Mais il y a une tout autre gamme de décisions qui témoignaient d’une forme de désespoir, celui de vouloir à tout prix aller chercher des victoires à un moment où une gestion à plus grande échelle aurait demandé autre chose. 

Le 14 décembre 2021 à Pittsburgh, par exemple — le fameux soir où Jeff Petry a déploré l’absence de structure dans le jeu du Canadien — Ducharme a soutenu après la défaite de son équipe que le gardien Jake Allen jouait trop. Un commentaire étrange venant d’un entraîneur-chef qui avait pourtant le pouvoir de décider qui il voulait voir devant le filet.

Or, Allen était le meilleur gardien disponible pour donner une chance de gagner à son équipe, et Ducharme s’accrochait à l’espoir qu’il l’aide à aller chercher des points ici et là.

Difficile à défendre? Peut-être, mais on comprend un peu mieux aujourd’hui pourquoi l’ex-entraîneur avait décidé de procéder d’une telle manière.

Dans le cadre de sa première entrevue individuelle depuis son congédiement par le Canadien, en février dernier, Ducharme a soutenu n’avoir jamais eu de discussions avec Jeff Gorton, ni avec Kent Hughes, par rapport à la façon dont il devait aborder la suite de la saison après un départ catastrophique. Les deux nouveaux dirigeants n’ont jamais orienté le message avec lui, et Ducharme ne se sentait pas la liberté de décider par lui-même que gagner des matchs cessait d’être important.

« C’est le côté qui me fait mal, ou qui me déçoit le plus, de ne pas avoir eu la chance de m’asseoir avec eux pour leur dire comment je voyais le hockey, nous a expliqué Ducharme.

« Si le plan était de perdre le plus de matchs et de faire jouer les jeunes, j’aurais aimé ça le savoir parce que j’aurais pris une approche différente avec eux. J’essayais de squeezer partout pour avoir un peu de résultats. Je voyais des équipes qui avaient des matchs annulés parce que cinq de leurs joueurs avaient la Covid. Nous on en avait dix, plus huit autres qui étaient blessés, et on jouait pareil… »

Le fait qu’Alex Belzile ait été utilisé davantage que Cole Caufield dans des matchs de la Ligue nationale illustre autrement comment Ducharme naviguait à vue. Vous aviez d’un côté un vétéran de la Ligue américaine qui mangeait les bandes et de l’autre une recrue de la LNH qui paraissait complètement désorientée. Cela pouvait certes aider le Canadien un soir donné, mais dans une perspective plus large, si la priorité était de développer le jeune Caufield correctement et non d’améliorer les chances de gagner un match dans une saison déjà vouée à l’échec, les orientations auraient dû être différentes.

Caufield, qui n’avait marqué qu’un but en 30 rencontres, et qui avait même été cédé brièvement au Rocket de Laval, a compté dès le premier match de Martin St-Louis à la barre du Canadien, et il a terminé la saison avec 22 buts en 37 matchs sous les ordres du nouvel entraîneur-chef.

Ducharme a entendu plus d’une fois l’opinion selon laquelle il avait coûté le trophée Calder au jeune franc-tireur.

« Je trouve ça plate », nous a-t-il admis. 

On sent qu’il trouve la critique injuste, non seulement parce qu’elle vise la façon dont il a pu aider ou non Caufield à traverser sa première disette chez les pros, mais parce qu’elle sous-entend qu’il est lui-même à la source des ennuis du jeune ailier.

« Tout le monde disait qu’il allait marquer 40 buts avant même que ça commence, a rappelé Ducharme. S’il avait eu un bon départ, il aurait peut-être été capable, mais il est parti dans cette spirale-là, et le fait que l’équipe ait des difficultés, ça ne l’a pas aidé individuellement.

« Quand j’entends des choses comme ça, c’est comme si je ne voulais pas que Cole score 40 buts. J’aurais adoré qu’il score 40 buts! »

Lorsque Ducharme a quitté le Canadien, l’équipe était devenue dysfonctionnelle, incapable de cohésion, de succès et même de compétitivité. Or, dès le jour où St-Louis a pris sa place derrière le banc, le Canadien a immédiatement retrouvé son élan. Des joueurs enlisés dans de profondes léthargies ont émergé comme Thésée sortant des enfers.

Ce qu’observe l’ancien pilote du Canadien, c’est que Caufield, à l’instar de ses coéquipiers, a profité d’un message qui avait changé et qui avait enlevé aux joueurs toute pression liée à la victoire.

« On était tout le temps vu comme l’équipe qui était allée en finale de la Coupe Stanley et qui n’arrivait pas à gagner. Le changement d’entraîneur a envoyé le message aux partisans et aux joueurs ‘on reconstruit, on fait confiance aux jeunes’. Là le résultat n’était plus grave, Martin pouvait se permettre de parler de victoires morales. Moi, si je parlais de victoires morales, je me faisais ramasser. »

Le fait d’avoir été maintenu dans le flou par le nouvel état-major a mis la puce à l’oreille de Ducharme que ses jours à la barre du Tricolore étaient comptés.

« Je pense que quand Marc est parti, c’était déjà décidé », croit-il.

Ducharme n’était pas l’homme de la nouvelle direction et il n’allait pas obtenir le bénéfice du doute à la suite des circonstances exceptionnelles avec lesquelles il avait dû composer. Mais on peut aussi se demander si ses décisions auraient été différentes si Bergevin avait été reconduit dans ses fonctions avant le début du calendrier. Peut-être que rien n’aurait été différent dans l’approche de Ducharme. Mais en même temps, un DG ayant un nouveau contrat en poche, un DG qui soutient le jeune entraîneur qu’il a nommé à peine quelques mois auparavant, aurait permis à Ducharme de se sentir plus en selle.

Si la saison avait continué de prendre l’eau avec Bergevin à la tête du Canadien, c’est peut-être Ducharme lui-même qui aurait cessé d’agir avec la pression des résultats quotidiens, un peu comme l’on fait ses joueurs une fois que St-Louis l’a remplacé.

Gorton et Hughes sont arrivés avec la volonté de rebâtir jusqu’à un certain point le Canadien, alors que Ducharme — malgré l’été extrêmement court et le fait que l’équipe était amputée de nombreux éléments qui avaient été fondamentaux dans ses succès — avait amorcé la saison en se faisant dire que le Canadien devait continuer de foncer tête première.

« La situation n’était pas évidente pour Marc avec la dernière année de son contrat et les négociations avec Geoff (Molson), a dit Ducharme. C’est sûr que Marc n’avait pas la vision de rebâtir. On faisait une autre run pour essayer de faire les séries. »

Ducharme ne l’avait jamais exprimé ainsi auparavant, mais à ses yeux, espérer que le Canadien soit aussi compétitif en 2021-22 était pratiquement un leurre. Il aurait fallu que tous les éléments tombent en place pour que le CH ait seulement la chance de participer aux séries.

« Peut-être qu’on aurait eu une chance de se battre pour faire les séries dans des conditions idéales, donc avec Carey et Jake devant le filet, avec Edmundson qui est là… Tout le monde commence, tout le monde est en forme, tout le monde est à son top, et si on joue du gros hockey, on a une chance de faire les séries. Mais ça prenait du gros hockey, pas une saison moyenne. 

« Donc c’est avec ça que je m’en allais. »

Dominique Ducharme (Jean-Yves Ahern / USA TODAY)

Ducharme entamait la saison avec plusieurs effectifs en moins sur la patinoire, mais également dans le vestiaire. La perte de leaders comme Shea Weber et Corey Perry, avec qui l’entraîneur avait pris l’habitude de s’assoir, a été déterminante pour lui.

« On parlait de différents trucs, ils comprenaient ce que je voulais faire, et après le meeting avec les joueurs, je savais que le message allait être poursuivi dans le vestiaire », a expliqué Ducharme.

Les leaders sont faciles à identifier au sein des bonnes équipes, a-t-il ajouté, et le Canadien a passé la majorité de la dernière saison à essayer d’en trouver au sein de sa formation. Il a beaucoup été question de la culture que Weber avait contribué à instaurer en tant que capitaine du Tricolore, mais en matière de leadership, Ducharme est demeuré surpris que la route ayant mené le Canadien en finale de la Coupe Stanley n’ait pas donné plus de fruits et que la culture n’ait pas pris davantage racine la saison suivante.

« À travers ce parcours-là, comme groupe je pensais qu’on avait appris plus. D’accord, on perdait ces gars-là, mais j’avais confiance que d’autres prennent le relais, les Ben Chiarot et compagnie. Et en même temps, il y en a comme Edmundson et Byron qui manquaient à l’appel. Mais après avoir traversé tout ce qu’on avait traversé, et après avoir vu tout ce que ça prenait pour se rendre loin, je pensais que notre groupe aurait appris plus que ça. »

Un an plus tard, Ducharme n’est plus l’entraîneur et il laisse à d’autres le soin d’identifier au sein du groupe le capitaine dont l’équipe a besoin. Les principaux candidats sont quand même assez évidents à ses yeux.

« Un gars comme Edmundson a une présence dans le vestiaire. Nick est un gars qui carbure au défi et qui aime faire la différence. Gally se présente au travail à tous les jours de la même façon; c’est certainement un exemple. D’après moi ça va être parmi ces candidats-là. 

« Éventuellement, dans le futur, je pense que Suzuki va devenir un capitaine. Mais est-ce que ça va être tout de suite? Ça va dépendre s’ils jugent qu’il est prêt ou pas. »

Mais pourquoi Ducharme n’a-t-il pas reçu au moment opportun le soutien des joueurs pour porter son message, pour combler le vide laissé par certains vétérans et « passer à travers un mur », comme Ben Chiarot le disait à propos de l’entraîneur-adjoint Luke Richardson?

Lorsque nous lui avons soumis l’idée qu’il s’était peut-être montré trop inflexible par rapport à son système de jeu, et que plus de souplesse était peut-être une leçon à retenir de son premier séjour comme entraîneur-chef dans la LNH, Ducharme a soutenu qu’il n’aurait pas changé une foule de choses.

« En regardant en arrière, il y a peut-être des petites modifications que j’aurais faites, mais pas énormément. Dans la ligue, il y a peut-être cinq façons de jouer. Tu vois le style des Islanders sous Barry Trotz, ou Colorado et Edmonton… Ça dépend des effectifs que tu as. Mais on ne pouvait pas ouvrir les valves. Il y a peut-être des choses que je ferais différemment en zone neutre, mais je le ferai différemment dans mon prochain défi, ou selon l’effectif que je vais avoir. »

Il apparaît évident que Ducharme n’identifie pas de faute majeure en termes de système ou encore de communication dans la façon dont il a mené le Tricolore. Il a encaissé la critique de Petry à Pittsburgh et dit avoir réglé la question avec lui. 

Mais de là à croire qu’il était à couteaux tirés avec ses joueurs?

« J’essayais de les aider ou de les pousser le plus possible pour qu’ils performent le mieux possible, mais individuellement je n’ai jamais eu de problème avec personne », a-t-il assuré.

Petry, en particulier, n’était pas dans le bon état d’esprit en raison de sa situation familiale, a noté Ducharme. Dès le début du camp d’entraînement, l’ancien coach avait constaté que ses joueurs étaient vidés mentalement et qu’ils n’étaient pas en bonne condition physique à la suite du trop court été, et Petry est celui chez qui cela se manifestait de la façon la plus évidente.

« Mentalement, avec tout ce qui se passait autour de lui, c’était difficile. Tu as beau essayer d’encourager un gars et de lui dire de s’amuser, quand c’est en dedans de toi, c’est dur de décrocher… »

Martin St-Louis est arrivé derrière le banc du Canadien, on a louangé ses qualités de communicateur, ses bonnes idées, le fait qu’il avait bonne réputation à travers la ligue, et il est immédiatement devenu la saveur du mois.

« On disait la même chose de moi à la même date l’an dernier, rappelle Ducharme. Les choses changent vite dans le hockey, positivement ou négativement. J’ai stationné ma voiture au Centre Bell avant un voyage à Ottawa et Winnipeg, et quand je suis revenu la chercher, j’étais entraîneur-chef du Canadien. Cinq mois plus tard on était en finale de la Coupe Stanley, et six mois après ça, on avait vécu une tempête parfaite. Ça change vite. »

Ducharme n’en veut pas du tout à St-Louis, un homme dont il estime suffisamment les compétences pour lui avoir offert un poste d’entraîneur-adjoint, poste qui a fini par échoir à Trevor Letowski.

« On pouvait passer un an ou deux sans se parler, lui et moi, mais c’était comme un vieux chum avec qui, lorsqu’on reprend contact, c’est comme si l’on s’était parlé la veille », confie celui qui avait accueilli St-Louis à l’Université du Vermont à sa première saison là-bas.

L’été dernier, St-Louis lui a dit qu’il avait besoin de deux ans de plus pour amener son plus jeune garçon au niveau où il voulait l’amener.

« La situation a changé, a convenu Ducharme. Ce n’est pas tous les jours que tu te fais offrir ça. Je le comprends. »

Pour sa part, Ducharme souhaite qu’avec le temps, un peu à l’image des amateurs qu’il rencontre dans la rue, l’histoire retiendra davantage le fait qu’il a amené le Canadien en finale de la Coupe Stanley plutôt que la débandade qui a suivi.

« Combien de coachs du Canadien se sont rendus en finale de la Coupe Stanley? Il n’y en avait pas eu depuis 1993 et il y en a eu seulement quatre depuis 1980. Donc je suis fier de ça. Il n’y a rien de parfait et tu ne peux pas choisir.

« Je ne changerais rien pareil parce que ça va faire de moi un meilleur coach. Il y a eu des moments vraiment super. J’ai eu vraiment du fun durant notre poussée en séries. Mais de septembre à plus tard, je n’en avais pas de fun. Ce n’est pas pour ça qu’on fait du hockey… mais ça fait partie de la game. »

La réalité de diriger à Montréal l’a frappé de plein fouet à travers les yeux de sa fille de 17 ans, qui était affectée par le fait que son père soit aussi investi dans l’aventure.

« Quand on a scoré en prolongation contre Winnipeg pour gagner la série, ma blonde m’a dit que ma fille pleurait tellement était contente. Ça c’est le fun. Mais quand elle est venue au Centre Bell en novembre et qu’elle a passé trois heures avec deux gringos en arrière qui criaient après moi, elle ne pleurait pas pour la même raison à la fin. Je la voyais à travers le plexiglass et je me demandais pourquoi elle braillait.

« Tu te demandes si ça vaut la peine qu’elle passe à travers ça. Ça c’est moins drôle. »

Dominique Ducharme (Eric Bolte / USA TODAY)

Bien avant que l’histoire décide ce qu’elle retiendra de Ducharme, il faudra voir comment son passage derrière le banc du Canadien influencera la recherche d’un nouvel emploi.

Ne sent-il pas que sa « marque » a été affectée par ce qui s’est passé?

« C’est normal, reconnaît-il, mais j’ai confiance que les gens qui sont dans (l’industrie) comprennent. J’ai eu des discussions avec des gens dans la ligue. Eux aussi ils gèrent des choses et passent à travers des choses. Ça fait partie du coaching à ce niveau-là.

« Je sens que j’ai pas mal fait ce que j’avais à accomplir dans le junior. Pour le reste, je suis pas mal ouvert. Tout dépend de ce que je peux apporter et ce que peux en retirer. J’ai le luxe de pouvoir choisir une situation dans laquelle je vais devenir un meilleur coach et contribuer, peu importe que ce soit dans la LNH, dans la Ligue américaine ou en Europe. Je ne ferme aucune porte, mais ça dépend avec qui je vais travailler et si je vais en ressortir grandi. Je n’ai pas l’égo de dire que je suis seulement un entraîneur-chef. »

Ducharme plaide les circonstances atténuantes pour expliquer la saison 2021-22 du Canadien, et partout à travers la ligue, il y aura des gens pour reconnaître qu’il n’y en a pas manqué, des circonstances atténuantes, durant la pandémie. 

Ducharme n’aucun regret par rapport à la façon dont il a vécu son année à la tête du Tricolore, car il s’est donné à fond dans un travail qui, au final, a été aussi grisant qu’impitoyable. Mais il a quand même un regret par rapport au temps qu’il a eu à sa disposition.

« C’était une opportunité pour moi de m’établir. Tu vois les coachs aujourd’hui, ils restent là un bout de temps et ensuite ils changent de place. C’est important de s’établir et je n’ai pas vraiment eu le temps de faire ça. »

Tout s’est passé si vite. En un clin d’œil, le tourbillon l’emportait.

Il reste à voir de quelle manière il retombera sur ses pattes.

(Photo of Dominique Ducharme: Marc Antoine Godin / The Athletic)

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