Pas besoin de parler en chiffres pour comprendre que cette édition du CF Montréal a quelque chose d’unique.
On n’avait qu’à voir ses joueurs danser et chanter à tue-tête sur l’air de Sweet Caroline, dimanche soir dans leur vestiaire du BMO Field de Toronto, pour déceler ce petit je-ne-sais-quoi.
Une célébration devenue une tradition — instaurée par le vétéran Kei Kamara — après les victoires de la troupe de Wilfried Nancy en 2022.
Dimanche soir, le CFM avait acquis la 16e de son calendrier, un record du club en MLS.
Ce qui lui permettait aussi d’atteindre son plus haut total de points en une saison, soit 52, et de consolider sa deuxième place au classement de l’Association de l’Est.
Ses 4 buts contre le Toronto FC augmentaient sa récolte à 53, la meilleure de son histoire dans le circuit Garber. C’est un de plus qu’en 2017.
Il n’avait jamais remporté plus de quatre victoires sur la route en une saison. Celle de dimanche portait son total à neuf cette année.
Et tout cela alors qu’il reste encore cinq matchs à la saison.
Bon. Peut-être qu’il était nécessaire de parler en chiffres, finalement.
Parce qu’à la lumière de ceux-ci, et de ce qui est évident à l’œil nu, il n’y a qu’une seule conclusion possible : nous avons devant nous la meilleure équipe de l’histoire du club.
Il reste à voir ce qu’elle parviendra à accomplir en séries éliminatoires pour confirmer sa place dans l’imaginaire collectif. Et, peut-être, ravir ce titre à celle de 2016, qui avait atteint les demi-finales.
« Combat de boxe »
Ces records et ces résultats ne tombent pas du ciel. Le CFM va les chercher au terme d’efforts, d’adresse et, surtout, de résilience.
La remontée de dimanche — ce qui portait à 23 son total de points obtenus malgré des situations perdantes — en est un exemple probant. De 0-2 après 7 minutes à 3-2 après 45, Montréal a complètement déclassé son rival malgré un début de match cahoteux.
« Ils avaient à cœur de montrer que c’est une équipe sur le projet, a souligné Nancy après la rencontre. Qui a envie de s’éclater. Qui a envie de prendre du plaisir dans le jeu, mais aussi dans la bataille. »
« [Dimanche], ils ont fait les deux. J’ai vu un combat de boxe et un jeu d’échecs de la part de mes joueurs. »
« Ça a fait du bien quand on a souffert »
Wilfried Nancy est le premier architecte de cet état d’esprit solide comme le roc. C’est un formateur hors pair pour les jeunes joueurs, foi de Djordje Mihailovic. C’est un enseignant rassembleur qui réunit l’ensemble de son groupe sous une même cause, foi… de tous les joueurs à qui l’on pose la question.
Ses ouailles adhèrent à sa philosophie, qu’il a mise en place dès 2021, sa première saison en tant qu’entraîneur-chef. Il n’en a pas dérogé depuis. Dans les hauts comme dans les bas. À domicile comme à l’étranger. En tirant de l’arrière ou en menant au tableau indicateur. Le pied sur l’accélérateur, toujours.
« On a eu besoin de vivre certaines choses, expliquait-il dimanche. L’année dernière, ça a fait du bien quand on a souffert. En début de cette année aussi. On a fait la Ligue des champions. On a voyagé 13 heures pour arriver à bon port. »
Il rappelle aussi les trois défaites consécutives en entame du calendrier 2022.
« Grâce à ces matchs-là, les joueurs sont capables de jouer avec intensité et faire ce qu’ils font. Sans eux, on n’aurait pas été capables de le faire. On aime tous gagner, mais il faut apprendre avec la défaite. Il faut la savourer pour revenir encore meilleur. »
Gagner le respect
Ce succès mène aujourd’hui à des réclamations de changement de paradigme chez les joueurs. À commencer par Kamal Miller.
« On a senti un manque de respect par toutes les questions des médias », a lancé le défenseur étoile après la rencontre de dimanche face à Toronto. « Toutes leurs questions portaient sur comment contenir le TFC. Ils auraient dû nous demander comment eux allaient devoir nous contenir nous. »
Son propos était corroboré par sa performance, d’ailleurs. L’international canadien a fourni l’étincelle nécessaire à son équipe pour entamer la remontée en marquant le 1-2 à la volée (19e). Mais aussi par le fait que Montréal est maintenant à 18 points de Toronto au classement.
« On a simplement prouvé que peu importe ce qu’ils ont fait lors du marché des transferts, on demeure une puissante équipe. On voulait se battre pour gagner ce respect. [Dimanche soir], on l’a fait. »
On a commencé la saison en s’interrogeant sur le bien-fondé de la transformation du CF Montréal en club formateur. On la termine en le considérant comme un favori pour la Coupe MLS. Preuve intangible, s’il en est une, de l’importance de jouer les matchs.
Le changement de paradigme du CF Montréal - La Presse
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